Après 2 500 exemplaires produits environ, la Peugeot 508 PSE n’est pas le succès attendu à tel point qu’on a cru, un peu vite, qu’elle disparaitrait dès cette année. Malgré ses 360 chevaux et un traitement stylistique spécifique, le navire amiral de la gamme 508 n’aura pas réussi à imposer (jusqu’à présent) la toute nouvelle griffe Peugeot Sport Engineering. Que l’on se rassure, la 508 PSE n’est pas la seule parmi les berlines françaises du début des années 80 à s’être prise un gadin en tentant d’apporter un peu de muscle sous des dehors (presque) sages.
Production (2021-2023) : 2 500 exemplaires environ
EDIT du 9 février : annoncée par l’Argus comme retirée du catalogue, la 508 PSE est bien confirmée par Peugeot qui présentera la gamme restylée de la 508 le 24 février. Mais les faibles ventes de la PSE résonnent malgré tout comme un échec.
Avant que les puristes et autres amateurs d’allemandes survitaminées ne viennent crier leur désarroi en commentaire, autant préciser les choses : la 508 PSE n’est pas une “vraie” sportive (si tant est qu’il y ait une définition précise dans le cas d’une berline de cette taille) d’autant qu’elle fait largement appel à des moteurs électriques pour compenser son 1.6 Turbo de 200 chevaux et faire passer le tout à la hauteur symbolique de 360 bourrins plutôt sages. Elle représente cependant la volonté de proposer à une clientèle forcément limitée (vu le prix de 71 000 € demandé) une voiture véloce sous une carrosserie en voie de disparition : la berline.
Les constructeurs français ont refusé l’obstacle
Pour des raisons autant politiques que commerciales (voire par frilosité), les constructeurs français ont refusé l’obstacle des grosses motorisations pendant longtemps. On mettra à part le V8 anémique de la Ford/Simca Vedette et même le V6 Maserati de la SM puisqu’il ne concernait qu’un grand coupé (Chapron en réalisera cependant 8 exemplaires en version Opéra, cf ci-dessous). Facel Vega avec l’Excellence ou Jean Tastevin avec la Monica 560 tentèrent le pari de la berline luxueuse et puissante, sans succès. Le lancement du PRV n’offrait pas vraiment des performances sportives à ses débuts mais permettait une base solide pour les développements futurs. C’est dans les années 80 que l’idée d’une berline “performante” refait surface notamment chez PSA avec la Talbot Tagora SX dont la cavalerie dépassait celles de ses rivales 604 ou R30. Durant les années 80 et 90, les marques françaises osèrent sortir de leur zone de confort avec une flopée de propositions qui, toutes, restèrent pourtant relativement confidentielles.
Une 508 PSE Courageuse
C’était donc courageux, chez Peugeot, d’oser sortir la 508 PSE en 2021 (et son équivalent plus orienté luxe DS 9 E-Tense 360). C’était aussi une façon de dire que l’électrification obligatoire ne signifiait pas la fin d’un certain plaisir hybride (au sens propre comme au figuré). Quoi qu’il arrive, c’était couillu. Mais avec 314 unités livrées en 2022 en France (sur 3 747 immatriculations de 508 II dans l’Hexagone, ce qui reste dans l’objectif de 5 à 6 % du total, voire même mieux), la 508 PSE est sans doute l’élément le plus visible d’un échec plus large : celui de la 508 et de la carrosserie de berline traditionnelle dans un monde où le SUV devient la norme.
Voici donc le florilège des berlines “sportives” (les guillemets sont importants) françaises qui, toutes ou presque (il manque les chiffres de la Renault 25 V6 Turbo) se sont pris un gadin (c’est la vie). J’ai volontairement exclu les versions “sages” du PRV sauf dans le cas de la 505 V6 au tempérament de propulsion.
Facel Vega Excellence : 1958-1964, 153 exemplaires
L’Excellence voulait être l’équivalent des Rolls ou Bentley de l’époque. Large berline aux portes antagonistes, elle en avait le luxe et la ligne, mais son moteur V8 Chrysler de 6.4 litres (335 puis 390 chevaux) portait en lui son arrêt de mort : il n’était pas français (et sans doute trop “roturier” pour certains). Confidentielle, sa production cessera avec la disparition de la marque en 1964.
Citroën SM Opéra : 1972-1975, 8 exemplaires
C’est la commande des deux SM Présidentielles au carrossier Chapron qui lui donnera des idées de berlines sur la base du coupé GT Citroën SM lancé en 1970. Sur la base de ses travaux préparatoires pour l’Elysées, Chapron propose donc une berline racée et élégante mais malheureusement bien trop chère, dotée du V6 Maserati injection de 178 chevaux (et même 200 chevaux sur certains modèles). Seuls 8 clients se laisseront tenter.
Monica 560 : 1973-1975, 28 exemplaires
Depuis la fin des années 60, Jean Tastevin tente lui aussi de se lancer dans la berline puissante et haut de gamme produite en France. Tout comme Facel Vega avant lui, l’homme se trouve obligé de recourir à un V8 Chrysler de 5,6 litres et 285 chevaux. Malheureusement, le long temps de développement (et les difficultés d’une telle entreprise) rendront la Monica 560 trop chère et trop gourmande après la crise pétrolière de 1973. Seuls 28 exemplaires seront produits malgré une ligne séduisante et un intérieur digne d’une Jaguar.
Talbot Tagora SX : 1981-1983, 1 083 exemplaires
Dans l’enthousiasme d’un mariage qui semblait parfait, PSA décide d’offrir à la grande berline Talbot Tagora une version SX dotée d’un 2.7 PRV poussé à 165 chevaux (certaines seront dotées d’un kit Danielson de 200 chevaux), faisant d’elle la plus puissante des berlines françaises de l’époque. Mais à l’image de la 508 PSE d’aujourd’hui, la SX pâtira de l’échec global de la Tagora (et de l’environnement particulièrement compliqué pour PSA au début des années 80). Résultat, elle ne sera produite que deux ans, et ne trouvera que 1 083 acheteurs.
Peugeot 505 Turbo injection / V6
Turbo : 1983-1989, 22 580 exemplaires
V6 : 1986-1989, 10 000 exemplaires environ
Avec la 505, Peugeot tient là un drôle de modèle, successeur de la 504 mais placé sous la 604, et qui cohabitera avec la 305 puis la 405. Point non négligeable, il s’agit d’une propulsion qui apprécie le surcroît de puissance. Surfant sur la mode GTI, Peugeot va d’abord dégainer une version Turbo du 2.2 d’origine Chrysler (et retravaillé par Porsche) développant 150 chevaux, vite remplacé par une version 160 chevaux plus convaincante. En 1986, elle culmine à 180 chevaux (voire 200 avec le kit PTS développé par Danielson). Cette année-là, Peugeot propose la V6 qui hérite du PRV 12 soupapes de 170 chevaux : une même voiture, deux philosophies, mais des puissances respectables et un comportement réjouissant. Pas de quoi, cependant, séduire plus de 35 000 clients à elles deux !
Renault 25 V6 Turbo : 1984-1992 (production non communiquée)
Dès 1984 (AM 85), Renault propose pour sa nouvelle 25 une version plus péchue nommée V6 Turbo. Le PRV passe à 2.5 litres (au lieu de 2.7 sur les versions V6 “normales”) et 182 chevaux (contre 144). De quoi résister aux puissantes allemandes sur l’autoroute. En 1990, les nouvelles V6 Turbo passent à 205 chevaux et deviennent encore plus désirables notamment en version Baccara. Malheureusement, impossible de trouver les chiffres réels mais il est probable que ce soit la plus produite de toutes nos berlines françaises listées ici.
Citroën CX GTI Turbo & Turbo 2 : 1984 à 1991, 12 912 exemplaires
Chez Citroën, il est acté depuis son lancement que la CX ne disposerait pas du PRV, mais cela n’empêche pas d’aller titiller la concurrence et d’exploiter au maximum les qualités dynamiques de la voiture. En 1984, la marque présente donc la GTI Turbo dont le 4 pattes de 2.5 (d’origine Citroën et non Chrysler comme la 505) offre pas moins de 168 chevaux. Largement de quoi en faire un avion de chasse que bien des allemandes redouteront sur l’Autobahn ! Avec presque 13 000 exemplaires vendus (en complément des GTI atmosphériques), les Turbo et Turbo 2 s’en sortiront plutôt bien !
Citroën BX 16 soupapes : 1987-1993, 15 440 exemplaires
On l’oublie souvent, mais la BX fut un carton qui sauva, autant que la 205, PSA de la faillite. Après des versions GTI déjà sympathiques, Citroën lance en 1987 la 16 soupapes dotée d’un 4 cylindres qu’on retrouvera peu de temps plus tard sur la 405 Mi16. Avec ses 160 chevaux et une vraie légèreté (sans même parler de sa suspension), la 16S complète la CX Turbo à merveille, et réussit à se vendre en deux séries (GTI 16 Soupapes ou “seulement” 16 soupapes) à plus de 15 000 exemplaires. Attention, les modèles 92 sont catalysés et perdent 20 chevaux !!!
Renault 21 2 Litres Turbo : 1987-1993, 13 788 exemplaires
En même temps que Citroën, Renault attaque avec une version vitaminée de sa 21. Là encore, on fait appel au turbo qui pousse le 2 litres à 175 chevaux, en traction comme en intégrale (une rareté à 875 exemplaires). Les chiffres parlent : la 21 2 litres Turbo aura marqué les esprits (sans doute grâce à la pub “ABS Bienzür” ou à la BRI) mais se vendra moins que la BX concurrente pourtant moins puissante. Comme la BX, elle perdra des chevaux avec le passage au catalyseur, mais de façon moins drastique (163 chevaux).
Peugeot 405 Mi16 : 1987-1995 (45 659 exemplaires)
La Mi16 récupère le 16 soupapes étrenné quelques mois avant par la BX 16 soupapes. Moins puissante et moins charismatique que la 21 2 Litres Turbo de chez Renault, elle s’est pourtant mieux vendue elle-aussi, comme quoi on oublie parfois l’évidence (les deux jumelles de PSA cumulent 60 000 ventes contre à peine 14 000 pour la berline au losange). Même recette que pour la BX, avec un 1.9 16 soupapes de 160 chevaux (ou un ACAV 2 litres de 155 chevaux “officiels”, en fait beaucoup moins, à partir de 1992) : un excellent compromis entre agilité, puissance, et tarif !
Découvrir l’histoire des 405 Mi16 et T16.
Peugeot 605 SV-24 / Citroën XM V6-24 / ES9 (hors V6 12 soupapes donc)
605 (PRV + ES9) : 1989-1999, 8 405 exemplaires
XM (PRV + ES9) : 1989-2000, 16 166 exemplaires
Le duo 605/XM arrive sur le marché avec quasiment les mêmes arguments, à l’exception de la suspension. En haut de la gamme, PSA étrenne un PRV à 24 soupapes en complément du 12 soupapes de 170 chevaux déjà vu (ou presque) sur la 505 V6. A la clé, 200 chevaux et une électronique capricieuse. En contrepartie, entre deux séances au garage, des performances de haut niveau. Mais tout cela se payait au prix cher en comparaison d’allemandes disposant parfois de 2 cylindres de plus et de 30 ou 40 chevaux supplémentaires : il fallait être chauvin. Néanmoins, le chiffre nous montre un certain succès quand on additionne avec l’ES9 venu avec les restylages et développant, lui, 194 chevaux.
Les chiffres de production de la XM V6 : ici
Les chiffres de production de la 605 : ici
Renault Safrane Biturbo : 1993-1996, 806 exemplaires
La Safrane Biturbo, c’est LA déception de tous les amateurs de cette génération. Elle promettait tant, faisait un effort de différenciation avec ses boucliers et jantes spécifiques, le tout avec l’aide de toutes les bonnes fées : Hartge pour le moteur, Irmscher pour le look, et le Bérex pour rectifier le tir…. 250 chevaux, transmission intégrale, luxe inouï pour les versions Baccara, mais tarif délirant et fragilité à la hauteur. Au total, seuls 806 unités sortiront de ce ballet industriel entre la France et l’Allemagne. Dommage, on y était presque !
Peugeot 405 T16 : 1993-1995, 1 046 exemplaires
La 405 T16 est, dans la catégorie d’en dessous, l’autre grande déception avec la Safrane Biturbo. 4 roues motrices comme l’autre française, 200 chevaux poussés à 220 pendant quelques secondes grâce à un overboost, un look encore d’actualité mais sur une caisse commençant à faire son âge, elle ne séduira qu’à peine plus que 1 000 clients, en comptant la Gendarmerie. Chère, pas assez exclusive, et elle-aussi fragile, elle arrivera (en plus) bien trop tard dans la carrière de la 405.
Renault Laguna Biturbo : 1995, de 3 à 5 exemplaires.
Hartge pensait (à tort) qu’une gamme Biturbo pouvait être développée chez Renault. Avec la sortie de la Laguna, le préparateur allemand tente le coup avec une berline vitaminée dotée d’un V6 PRV porté cette fois-ci à 280 chevaux sans transmission intégrale ! Simple traction, l’engin est un bolide qu’il faut savoir conduire mais qui ne sera pas retenu par Renault, bien déçu par la Safrane éponyme. Dommage.
Citroën Xantia Activa : 1995-2000, 18 242 exemplaires
La Xantia Activa est une bête à part, avec sa suspension Hydractive et son système SC Car qui lui permet de virer à plat. Pour ces raisons, elle figure ici dans toutes ses versions moteurs que ce soit en essence (2 litres 16 soupapes 135 ou 150 chevaux, 2 litres TCT de 150 chevaux, V6 ES9 de 194 chevaux ou même les diesel de 2.1 TD ou 2.0 HDi de 110 chevaux). Cette voiture est vraiment à part, et fait comprendre le slogan Pirelli à la perfection : sans maîtrise, la puissance n’est rien. Malheureusement, l’Activa restera relativement confidentielle (surtout dans sa version V6, 2 700 exemplaires au maximum) et le système SC Car sans doute trop cher ne sera jamais repris de série ! Cela dit, quel plaisir de laisser une allemande dans les virages avec un HDi hein, on est d’accord ?
DS 9 E-Tense 360 : 2021- ???, production non communiquée
Jumelle de la 508 PSE dont elle partage la motorisation hybride cumulant 360 chevaux, la DS 9 E-Tense 360 est sans doute encore plus rare puisque la DS 9 se vend encore moins que la 508. Un futur collector à n’en pas douter, d’autant qu’elle s’oriente vers le luxe et le confort tandis que la Peugeot cherche à affirmer son côté sportif. Quand les chiffres de production sortiront, on en rigolera, mais en fait ça ne fait pas rire : est-ce la voiture qui n’est pas bonne (les essais confirment une bonne voiture) ou le marché qui n’existe pas (ou plus) en France ou ailleurs ? Venue trop tard, comme la 508 PSE, cette E-Tense paye cash la désaffection pour les berlines en général et l’incapacité française à maintenir une offre dans les années 2000 (Renault tentera bien des V6 3.5 Nissan dans les Vel Satis, Avantime ou Laguna / Laguna Coupé, sans prétendre à la sportivité).
Les chiffres décevants de la 508 PSE (et celle corollaire, même si elle n’a pas été annoncée, de sa cousine DS 9) n’est donc pas une bonne nouvelle. PSA (devenu Stellantis) aura essayé, tandis que Renault aura lâché rapidement l’idée, malgré une Talisman ou un Espace doté du moteur dégonflé de l’Alpine, à 225 chevaux (sans intérêt sur ces voitures). La place est donc prise et bien prise par les allemands, en attendant la révolution électrique qui changera (ou pas ?) la donne !
2 commentaires
Il avait cas sortir le proto de la 308 , ca aurait marché a coup sûr !
j utilise depuis 2 mois une 508 PSE et cet échec commercial est vraiment injuste car cette voiture est petrie de qualités…. malheureusement méconnus du public ! Entre son rapport performances / consommation (a condition de la charger tout les jours) , le compromis confort / tenue de route et son double visage de familiale confortable sur grands axes / sportive sur petites routes, c est un vrai couteau suisse de la berline performante cette auto ! Quand a ses qualités sportives elles sont réelles tant en puissance moteur qu en châssis ou freinage. Le seul bémol est le fait que la puissance parait peu abondante en dessous de 80 / 100 km/h ce qui peut décevoir sur des itinéraires ou cette vitesse est peu demandée. Je soupçonne une histoire de bride pour préserver la transmission