Numérotation incongrue, paternité contestée, positionnement compliqué, la Peugeot 309 s’avère plus originale que ne le laisse paraître son design sage. Grosse 205 ou petite 405, elle permet à Peugeot d’élargir sa gamme et de remplacer partiellement la 305 (la 405 fera le reste) et totalement l’Horizon vieillissante. Moins enthousiasmante que sa petite sœur, moins réussie que sa grande sœur, elle fera pourtant une carrière des plus méritantes pour un investissement relativement faible, contribuant elle-aussi au redressement de PSA. Déclinée en de nombreuses versions, y compris sportives, la 309 est une voiture à redécouvrir aujourd’hui pour sa polyvalence, sa fiabilité (on en voit encore de nombreuses sur les routes de France) et sa singularité au sein de la gamme de l’époque.
Production (1985-1997) : 1 627 847 exemplaires
Dont : 18 262 GTI et 5 895 GTI-16
Une genèse controversée
Le projet C28 est lancé en 1980 pour le remplacement de l’ex Simca-Chrysler devenue Talbot Horizon, une berline à hayon de taille moyenne, lancée seulement deux années plus tôt. Vendue jusqu’en 1985, elle ne déméritera pas (869 000 exemplaires) mais fera presque deux fois moins bien que la 309 qui nous préoccupe. Bref, la C28 voit à l’époque son style étudié à Whitley (ex-Chrysler UK) et son développement technique réalisé à Poissy (ex-Simca). Il s’agit bien, à l’époque, de développer une Talbot mais les équipes du style sont déjà en rapport avec celles de Peugeot qui développent le projet M24 (la future 205) pour tenter de créer quelques synergies. Les choses vont changer à partir de 1982. Le groupe, malgré sa tentative de relance de Talbot allant même jusqu’à la Formule 1 avec Ligier, est exsangue. La BX (qui contribuera au sauvetage au moins autant que la 205) vient tout juste d’être lancée, sans effet sur les comptes pour l’instant tandis que Jacques Calvet arrive aux commandes. Rapidement, des décisions sont prises d’autant que les ventes de la marque au T chutent dramatiquement malgré une excellente Samba. La grève déclenchée à Poissy en juin 1982 face à la baisse des effectifs n’arrange rien. Le projet C28 prend alors une toute autre tournure : il s’agira d’une Peugeot.
L’usine de Poissy bloquée par les grèves (1982, 1983/84)
Alors que le groupe PSA se trouve dans une situation dramatique de quasi-faillite et joue son va-tout sur deux projets, majeurs, la Citroën BX et la Peugeot 205, des grèves éclatent chez Citroën à Aulnay en avril 1982, puis chez Talbot à Poissy. Il s’agit alors de préserver l’emploi (chez Talbot, ¼ des effectifs ont déjà disparu), de lutter contre le syndicat CSL de droite et pro-patronat, mais aussi d’améliorer les conditions de travail des OS, en particulier ceux d’origine maghrébine souvent maltraités et désavantagé. Ce premier conflit, violent, finit par se régler et permet à la CGT jusqu’alors quasi-clandestine de devenir majoritaire dans l’usine de Poissy.
En décembre 1983 puis en janvier 1984, il s’agit désormais de lutter contre les réductions d’effectifs prévus au sein du groupe PSA. Chez Talbot, on est particulièrement inquiet pour l’usine. C’est dans ce contexte qu’est affirmé le lancement d’une nouvelle voiture sur le site, sans préciser lequel, et des investissements conséquents. Le premier ministre Pierre Mauroy l’affirme le 7 décembre 1983 à Poissy : l’Horizon aura une héritière. On se garde bien de dire qu’il s’agira d’une Peugeot, une décision pourtant déjà prise à l’époque. La Peugeot 309 sauvera bien Poissy, mais signera l’arrêt de mort de Talbot, vouée à disparaître à l’horizon 1986 en France, et 1987 pour l’Espagne.
Jusqu’alors, la voiture n’était pas encore définie, ni techniquement, ni stylistiquement. Dans la tête de l’Etat Major de PSA, les choses deviennent plus claires : il semble impossible désormais de maintenir trois marques généralistes au sein du Groupe, et la priorité est donnée à Peugeot pour le lancement de la 205 et à Citroën pour le soutien d’une BX en plein lancement (crucial). Pour apaiser les esprits, on laisse planer le doute quant à l’identité de la future berline de gamme moyenne (segment M1) et on apporte quelques garanties : le nouveau modèle sera bien produit à Poissy (ainsi que d’autres Peugeot comme la 205 qui cartonne). Pourtant, au bureau de Style Talbot, devenu Style Avancé PSA (ce qui veut tout dire), on est déjà reparti dans une nouvelle direction : une voiture s’intégrant dans la gamme Peugeot. Les liens avec les équipes du projet M24 se resserrent. La plate-forme technique sera celle de la 205 (avec un châssis rallongé et élargi, ainsi que des portes avant en commun), tandis que le style s’en rapproche (ainsi que du projet D6, lancé en octobre 1982, qui donnera naissance à la 405). Seule concession : des moteurs 1.1 et 1.3 d’origine Simca en bas de la gamme (le temps d’épuiser les stocks?), moteurs qui quitteront le catalogue en 1989.
Une gamme parfaitement pensée
Dès 1982 donc, l’idée d’une Talbot spécifique est abandonnée. Entre 1983 et 1984, le style de la future Peugeot est gelé et les 28 premiers prototypes construits. Chez PSA, les choses sont claires depuis longtemps, et le nom d’Arizona n’est jamais évoqué. D’ailleurs, la 309 s’intègre parfaitement dans son plan produit : une citadine (M24/205), une compacte (C28/309), une familiale (D6/405) et une grande routière (Z6/605). Il s’agit d’un ordre un peu différent chez Citroën : une familiale (BX) puis une citadine (AX), suivie d’une grande routière (XM) et enfin d’une compacte (ZX). Un chevauchement pertinent pour proposer sans arrêt un nouveau modèle dans un nouveau segment (à l’exception des grandes routières 605 et XM, lancées au même moment pour des raisons évidentes de coût de développement).
L’Arizona : fantasme ou réalité avortée ?
Si vous avez lu jusqu’ici, vous avez donc compris que je doute de la réalité de l’Arizona (nom lâché par la presse mais dont jamais PSA n’a parlé). Prenons le premier jeu de photo à notre disposition : il s’agit vraisemblablement d’un des premiers prototypes avant que le style ne soit figé. S’il diffère de la 309 à sa sortie, rien n’indique qu’il s’agisse d’une Talbot. Certes les feux arrière sont différents de ceux que nous connaissons, mais ils ressemblent plus à des feux de 205 étirés qu’à ceux d’une Solara et encore moins d’une Samba. Prenons les phares désormais : ils ressemblent là aussi à ceux d’une 205 et ne sont pas si éloignés de la définition de série. La grille de calandre, difficilement visible, pose en revanche question : elle ressemble à celle de la Solara mais pourrait tout aussi bien provenir de la 305 phase 1 (la phase 2 n’est apparue qu’en 1982). On ne voit aucun logo visible, rien ne prouve donc qu’il s’agit d’une Talbot. On notera un hayon encore provisoire, ne donnant pas encore l’impression d’un troisième volume.
Observons maintenant le deuxième jeu de photo : cette fois-ci, il s’agit d’une 309 telle que nous la connaissons, quasiment de série à l’exception des logos et monogrammes. Elle s’appelle d’ailleurs Talbot Horizon SX, et non Arizona. Elle est dotée de phares type 205 à l’avant et de feux arrière dont le style rappelle celui de la 505 Phase 2 (tout cela reste très Peugeot). Deux hypothèses viennent à moi : la première n’est sans doute pas la plus incongrue puisque j’imagine un fan de la marque s’offrant son fantasme en maquillant une 309 en Talbot Horizon. Un indice chez vous ? Notez le logo rond Talbot placé sur le rectangle parfaitement adapté au logo de Peugeot prévu pour la 309. Quant à la grille de calandre, elle dépasse largement sur les feux (ce qui ressemble beaucoup à du bricolage). La seconde hypothèse ferait de ce modèle un test pour les marchés relativement fidèles à Talbot (l’Espagne en particulier, qui fabrique la Solara), test qui perdra de son intérêt quand l’arrêt définitif de la marque sera actée par PSA (sans doute entre 1983 et 1984).
Images prototypes : Curiosités automobiles
Et si Talbot avait survécu ?
Connaissez-vous l’uchronie, l’art de raconter une nouvelle histoire à partir d’un point de divergence (le moment où tout aurait pu basculer) ? Dans la rubrique Alternatives, vous retrouverez quelques « what if » (comme le disent les anglophones, souvent férus de ce genre de littérature) : Et si Panhard était restée indépendante ? Et si Renault n’avait pas renoncé à AMC et à son aventure américaine ? Je me suis naturellement penché sur le cas de Talbot en imaginant une histoire alternative idéale. Vous retrouverez évidemment une Arizona pleinement Talbot, et quelques petites surprises étonnantes.
Une numérotation compliquée
Ceux qui défendent la thèse d’une Talbot devenue Peugeot se basent donc sur une photo de clone badgé Horizon SX (au style Peugeot) et sur la numérotation étonnante de cette nouvelle lionne. Certes l’apparition d’un neuf étonne dans une gamme en cours d’uniformisation par le 5. Pourtant, cet écueil numérique n’est pas une surprise. Après-guerre, Peugeot a longtemps vécu sur une gamme restreinte s’adaptant petit à petit aux nouveaux segments : les numérotations en 20X puis 40X s’adaptent au marché sur des périodes longues et des gammes courtes (2 ou 3 modèles se chevauchant). Avec son habitude de conserver ses modèles plus que de raison, il faut parfois trouver des astuces (la 204 n’a rien à avoir avec la 203 dans son positionnement, la 504 inaugure le 50X alors que la 404 reste au catalogue sur le même niveau de gamme, etc).
La 304 est une 204 rallongée, et reste (presque) dans la même gamme tout en s’embourgeoisant (et en restant à ses côtés au catalogue), tandis que la 305 rallonge un peu la 304 et inaugure la série 05 un peu plus tard. Bref, la 305 trouve ses origines dans une série 20X : vous suivez toujours ? Or dans les années 80, la segmentation se standardise et celle de Peugeot n’est plus adaptée à l’actualité. Des 104/305//505/604 du début des années 80 on doit passer à 205/30 ?/405/605 à la fin de la décennie… Deux solution sont donc possible pour la série 30X : unifier la gamme en conservant le 305, en cherchant à capitaliser sur la dynamique et en faisant disparaître la 305 prématurément (une solution que j’aurai, personnellement, choisie), ou alors rester très Peugeot en faisant durer la 305 et apporter du sang neuf (vous l’avez?) avec une numérotation « exceptionnelle » et décalée : 309. La deuxième solution sera choisie par l’état major sans que cela ne perturbe finalement les clients (après avoir longuement hésité avec 308) : pour preuve, les 1 624 847 exemplaires vendues entre 1985 et 1993. A cette date, le retour au 06 est déjà initié depuis 1991 avec la 106, et la série 30X retrouve sa logique avec le lancement de la 306.
Alors que la 205 a le sex-appeal des citadines en vogue dans les années 80 (et 90), la 309 pâtit un peu de son côté bâtard. Ni petite, ni grande, ni originale, ni statutaire, elle va devoir se faire une place avec peu d’armes apparentes. Elle va tout d’abord miser sur une qualité séculaire chez Peugeot : la robustesse et la fiabilité, au détriment sans doute du physique (quoiqu’avec le recul, ce design était plutôt réussi). Toujours dans la tradition, elle va jouer sur sa polyvalence « de milieu de gamme » avec une large palette de finitions et de moteurs. Elle va aussi décliner les recettes initiées sur la 205, avec des versions sportives qui dynamisent l’offre. Elle recevra donc elle aussi, en 1987, ses déclinaisons GTI, avec pour particularité d’offrir le choix entre 3 et 5 portes, contrairement à la 205. L’offre sportive sera complétée au même moment par la plus grande 405 Mi16. La qualité du châssis et des trains roulants de la 309, compromis idéal entre 205 et 405, poussera même la direction à offrir à cette mal-aimé le must des moteurs Peugeot de l’époque : le 1.9 16 soupapes de la Mi16, donnant naissance à une 309 GTI-16 considérée aujourd’hui comme la plus grande réussite de ces années-là chez Peugeot !
LES PEUGEOT 309 SPORTIVES
Peugeot 309 GTI
La 309 GTI s’inspire profondément de sa petite sœur à succès la 205 et utilise la même recette : décoration tapageuse et moteur nerveux. Alors qu’à ses débuts, la 309 ne dispose dans sa gamme que d’une GT qui laisse la primeur de l’injection à la 205 en récupérant le 1.9 à carburateur et 105 chevaux de la 305 GTX, sa devancière, elle récupère en 1987 l’appellation mythique GTI en se dotant du 1.9 130 chevaux à injection. Certes, elle est une peu plus lourde que la 205 GTI pour une puissance identique, mais elle offre aussi (surtout?) plus de polyvalence, notamment dans sa version 5 portes. L’allongement du châssis la rend aussi plus docile et convient sans doute mieux aux papas pressés voulant concilier confort et practicité. Si la 309 GTI n’aura pas la diffusion ni l’aura de la 205 éponyme, elle contribuera à dynamiser la gamme au moment de l’apparition d’une autre icône, la 405. Elle se vendra à 18 262 exemplaires. A noter l’excellente version anglaise GTI Goodwood alliant distinction et rareté (en contrepartie d’un volant à droite), un graal de spécialiste.
Peugeot 309 GTI-16
Cette évolution parue en 1989 signera l’arrêt de mort de la version Turbo, jugée trop violente et peu en phase avec l’image de Peugeot à l’époque qui mise tout sur les moteurs multi-soupapes (4 soupapes par cylindre). Le succès de la 405 Mi16 donne des idées aux ingénieurs sochaliens : pourquoi ne pas fourrer (c’est le terme) cet excellent moteur de 160 chevaux sous le capot de la 309 qui bénéficie du gabarit idéal (poids, taille) pour en tirer la quintessence. Si la Turbo développait 5 chevaux de plus, c’était au détriment de l’agrément. Avec ses 16 soupapes, la 309 GTI devenait d’un coup d’un seul la référence son époque, alliant puissance et tenue de route. La R19 16s pourtant désirable ne pouvait pas rivaliser, bien que plus récente, pas plus que les 205 GTI plus compacte mais beaucoup moins puissantes. Pourtant, être la meilleure de ne veut pas dire écraser tout sur son passage : si la GTI-16 est aujourd’hui un mythe évidemment recherché, elle ne se vendra à l’époque qu’à 5 895 exemplaires.
La 309, une réussite signée Peugeot
Contrairement aux idées reçues, la 309 n’est pas un vilain petit canard. Sa conception pragmatique (base de l’excellente 205), son positionnement certes un peu nouveau chez Peugeot mais parfaitement complémentaire du duo star 205/405, sa polyvalence et sa fiabilité lui permettront de faire son trou. Plus je regarde cette voiture, plus je la sais Peugeot depuis le début malgré les errements numériques et sa conception déléguée à Talbot. Plus je la vois, moins je pense qu’une version Talbot au faciès aussi identique aurait pu s’intégrer dans la gamme de la marque au T, pas plus qu’elle n’aurait pu la sauver. Tout au plus aurait-elle pu faire plaisir aux clientèles ibérique et britannique attachées à Talbot par le biais de Barreiros et de Rootes. Si Talbot a disparu, ses usines n’ont cessé de continuer à produire pour le compte de PSA, à l’exception de Ryton fermée dans les années 90 ! Poissy est devenu l’un des centres névralgiques du groupe, avec Sochaux (Peugeot) et Rennes (Citroën) et n’a pas disparu malgré les difficultés du début des années 80, et la 309 a contribué à perpétuer l’héritage Simca puis Talbot tout en représentant la tradition Peugeot : chapeau.
Réduire la 309 à une Talbot rebadgée (et répéter sans arrêt le nom Arizona) alors que dès 1982 les dessins et la technique annonçait l’inverse me semble anachronique : la 309 a réussi son pari parce qu’elle était une Peugeot, et sa version Horizon (voire Arizona, évoquée par l’Auto-Journal du 15 janvier en ces termes : « c’est pourquoi le vocable Arizona aurait pu être retenu » – notez la conjugaison) n’aurait servi qu’à limiter la casse sans éviter la chute d’une marque généraliste de trop. Beaucoup pensent que Peugeot a tué Talbot : non, Peugeot a fait des erreurs, a subi les conséquences d’une politique hasardeuse au mauvais moment (crise pétrolière de 1979) mais a beaucoup donné pour « sauver » Talbot au début (Formule 1 notamment, Tagora plus puissante que sa sœur 604, Samba très réussie dotée d’une version cabriolet) avant de jeter l’éponge devant l’évidence. La 309 n’a en fait de Talbot que sa genèse du tout début (1980-1982) et son lieu de production pour sauver Poissy, et l’Arizona n’aurait été qu’un pis-aller. PSA se servira en 1991 de l’excellente base de la 309 pour concevoir la ZX (qui n’est donc pas plus une Talbot que la 309) en l’améliorant encore, base qui donnera l’excellente 306 chez Peugeot puis la Xsara chez Citroën, signe de l’excellente conception de cette étrange voiture.
Je suis prêt à parier que chez Peugeot, en 1982, lorsque la C28 devient 309 et abandonne toute idée d’Arizona/Horizon, personne n’imaginait vendre plus de 1,6 million de cette voiture, sous l’une ou l’autre des marques, et même avec les deux. Si le 9 blesse aujourd’hui les puristes et contribue à perpétuer la légende d’un vilain petit canard, l’excellence de l’articulation de la gamme Peugeot résultant des lancements des 205, 309, 405 et 605 joue contre eux : la méthode sera étendue dès 1991 avec une 106 se plaçant sous la 205. L’heure était désormais à la finesse de l’offre, et la 309 y avait contribué dès 1985. Enfin, l’héritage Simca tirera définitivement sa révérence en 1989 avec l’abandon des obsolète moteurs Poissy si caractéristiques en bas de gamme au profit de moteurs Peugeot.
Break 309 Heuliez
Toujours à l’affut d’un contrat, et s’étant fait le spécialiste du break auprès de Citroën (CX puis BX, et bientôt XM), le carrossier des Deux-Sèvres propose à Peugeot de compléter sa gamme avec un break comme Pininfarina l’avait fait pour la 205 avec la Verve. Malgré l’intérêt du concept, la marque déclinera la proposition pour une raison simple et typique de la façon de fonctionner du constructeur sochalien : la commercialisation de la 305 break déjà amortie continuait toujours pour le bas de gamme, tandis que la 405 s’offrait cette carrosserie pour le haut de gamme. On préféra donc se contenter de l’offre existante. Une erreur qui ne se répètera pas avec la 306 qui bénéficiera elle (et en interne) de cette variante encore très recherchée par les ménages.
Dommage d’avoir un peu limité les possibilités offertes par un tel modèle : pas de version break, malgré les propositions de l’entreprise Heuliez, pas plus que de cabriolet ce que la 306 obtiendra avec raison. Elle se contentera des classiques 3 et 5 portes avec un certain succès (presque 180 000 véhicules par an tout de même) pour un investissement très modique : une voiture très rentable donc, qui contribuera elle-aussi au succès du groupe au début des années 90 malgré l’échec de la grande 605.
La vie de la 309
A sa sortie en octobre 1985, la 309 n’est disponible qu’en version 5 portes (la 3 portes n’arrivera qu’en février 1987). Elle propose 4 motorisations : deux moteurs « Poissy » au son si caractéristique (un 1.1 litre issu de la Simca 1100 développant 55 chevaux, et un 1.3 litre déjà vu sous le capot des 1307, 1510, Horizon, Solara et même Matra Bagheera, avec 65 chevaux à la clé) et deux moteurs XU bien plus Peugeot (1.6 de 80 chevaux et 1.9 de 105 chevaux, déjà vu sous le capot – notamment – de la 305 GTX). En juin 1986, le diesel fait son apparition (XUD 1.9 de 65 chevaux). Avec l’apparition des versions 3 portes, la 309 s’encanaille avec le 1.9 injection de 130 chevaux (GTI).
En juillet 1988, les 1.6 passent à 92 chevaux (80 en automatique). Si la GT disparaît, le 1.9 105 reste sous le capot des SX (5p) et XS (3p). L’année suivante, la 309 reçoit un restylage bienvenu et ses motorisations évoluent encore : les moteurs Poissy disparaissent pour laisser la place à des TU (1.1 de 60 ch et 1.4 de 70 ch), la version automatique passe à 92 chevaux, et la superbe version GTI-16 (voir ci-dessus) fait son apparition, avec 160 chevaux de pur bonheur. Enfin, les versions diesel évoluent avec un 1.7 de 60 ch en atmo et 78 en turbo. En 1991, les 1.4 passent à 75 chevaux. En 1992, les moteurs 1.9 passent à l’injection récupérant 5 chevaux au passage. En revanche, le catalyseur fait beaucoup perdre aux sportives : la GTI redescend à 122 canassons, quand la GTI-16, elle passe à 148 chevaux. En juillet 1993, la fin est proche et la gamme est limitée au 1.1 essence et 1.7 diesel atmo, laissant ainsi la place à la 306. Au total, 1 624 847 exemplaires auront été écoulés, soit presque autant que la 305 et deux fois plus que l’Horizon.
Conclusion
Vous l’aurez compris, il y a, à mon sens, de nombreuses idées reçues à propos de la 309. Non, il ne s’agit pas d’une Talbot, mais bien d’une Peugeot et conçue comme tel dès 1982. Aux yeux de Peugeot (et malgré les grèves) il fallait sauver l’outil de production qu’était Poissy, quitte à sacrifier Talbot sur l’autel de la logique, des finances et du marché. Avec la 309, aux coûts de développement réduits, Peugeot obtenait le parfait trait d’union entre 205 et 405 et répondait à une demande forte du marché. Avec 1,6 millions de clients en un peu plus de 8 ans, elle installait la marque (et le groupe) sur ce segment devenu primordial, offrant une excellente base pour la descendance badgée du lion comme des chevrons.
Aujourd’hui, les cotes de la 309 restent assez faibles : seule la 309 GTI-16 explose les plafonds (dans sa version 160 ch, moins dans celle, catalysée, de 148 ch), pour sa rareté et ses performances. Les GTI « tout court » sont d’excellentes affaires (surtout en 5 portes), à condition d’en trouver en bon état. Tous les autres modèles sont encore des modèles d’usage, sans grand intérêt à part peut-être une série spéciale comme la Green, l’Océane ou la Chorus, ou les versions haute comme les SX, XS et GT. Mais pour qui veut un déplaçoir un peu original, pas cher, solide, et bénéficiant d’excellents trains roulants et d’une tenue de route exemplaires (sans parler de l’endurance des moteurs diesels), la 309 peut s’avérer être un choix malin et décalé.
En savoir plus :
Théorie de la 309 : https://fr.peugeot309.net/historique/episode-1
Théorie de l’Arizona : http://curiositesautomobiles.blogspot.com/2013/09/talbot-arizona-lhistoire-de-la-peugeot.html
Le conflit syndical chez Talbot :
https://www.cairn.info/revue-vingtieme-siecle-revue-d-histoire-2004-4-page-151.htm
Un commentaire
Bonjour, l’histoire est bien plus compliquée que cela et l’industrie réserve parfois des revirements inattendus qui font revoir tous les plans à la dernière minute.
Les photos originales du proto Horizon/309 sont en ma possession depuis leur développement 😉
Michel Rétal