Les séries 40X et 50X ont toujours tenu la place, chez Peugeot, de la berline familiale polyvalente, disponible en de nombreuses carrosseries et représentant le cœur de métier de la marque française. Une situation que la segmentation de plus en plus grande du marché automobile et l’avènement de concurrents directs tels que les monospaces et SUV a rendu caduque aujourd’hui : la berline familiale ne fait plus recette comme en témoigne la baisse perpétuelle de ce segment. Retour en chiffres sur une longue lignée que Peugeot défend encore vaillamment avec sa 508 II.
Du Plan Pons au segment D
Les berlines familiales “à la Peugeot” d’après-guerre ont, la plupart du temps, porté le chiffre 40X. Cependant, certaines d’entre elles, le cul entre deux chaises (ou entre deux segments) ont aussi porté le chiffre 50X. Pourtant, dans ce classement, on trouvera aussi deux modèles d’une autre série : la 203 et la 305. Cantonnée par le Plan Pons dans le segment des “voitures moyennes”, Peugeot va lancer après guerre là 203, qui répond parfaitement à la demande étatique de ce qui deviendra la voiture familiale (puis ensuite le segment M2, pour aboutir au segment D). Les moyens de production et marché encore faible ne permettent pas de développer des gammes pléthoriques comme aujourd’hui : Peugeot va donc concevoir une voiture à tout faire, reprenant la numérotation la plus cohérente vis à vis des modèles d’avant-guerre : 203. Son héritière, prendra ensuite la numérotation 403, pour mieux se démarquer (et se laisser la possibilité de développer une gamme plus large, ce qui arrivera en 1965 avec la 204).
De spécialiste à généraliste
A la fin des années 60, un autre problème se pose : comme Peugeot a pris l’habitude de conserver au catalogue ses voitures le plus longtemps possible quitte à faire cohabiter l’ancien et le nouveau modèle, il faut jouer avec les chiffres sans faire sauter trop vite d’une génération. L’héritière de la 404 devient donc 504, tout en s’embourgeoisant un peu. On fait aussi des économies en développant un modèle un peu plus statutaire sur la base d’un ancien modèle, comme la 304 vis à vis de la 204. Lors du lancement de la 305 en 1977, cette dernière monte en gamme par rapport à sa devancière 304, et inaugure la série des X05 : elle s’apparente pourtant à une berline familiale quand la 304 conservait une typologie de compacte. Bref, à la fin des années 70, c’est un vrai capharnaüm (qui s’aggravera avec l’arrivée de la 309). Au milieu des années 80, les choses vont malgré tout se stabiliser : la 405 cohabite avec une 505 un peu plus grande faisant le lien entre la 604 arrêtée en 1985 et la 605 lancée en 1990).
Les années 90 amène de la sérénité sur le créneau : les 40X sont du segment D, les 60X sur le segment M : affaire réglée ! Réglée ? Pas tout à fait puisqu’en 2011, la 508 remplace en même temps la 407 et la 607, relançant opportunément la série 50X, permettant en 2022 l’apparition d’une 408 au format hybride, s’intercalant entre la 308 dont elle partage la base et la 508 typée berline.
Et maintenant, place aux chiffres :
Peugeot 405 (1997-2023) : 5 115 726 ex
Sans surprise, la star des années 80 et 90 se place en haut du classement. Bénéficiant à fond de l’effet 205, la 405 se décline en berline ou break, mais aussi en sportives (Mi16, T16). Elle remplace avantageusement la timide 305 et annonce le style de la grande 605. Elle monte aussi en haut du classement par sa longue production à l’étranger, et notamment en Iran où elle continue de se vendre sous différentes formes !
Peugeot 504 (1968-2003) : 3 713 356 ex
Déclinée en berline, break, pick-up, coupé et cabriolet, la 504 est aussi l’aboutissement de la politique de Peugeot des années 50 et 60 : des voitures vastes et/ou à tout faire, statutaires et surtout solides, très solides. Comme la 405, elle bénéficie aussi de sa fabrication à l’étranger (notamment en Argentine) qui lui permet de tutoyer les 4 millions d’exemplaires.
Peugeot 404 (1960-1988) : 2 885 374 ex
Avec son style à l’américaine, elle a fait rentrer Peugeot dans la modernité des années 60. Disponible en berline, break, coupé, cabriolet ou pick-up, elle fera la joie des familles, des artisans, et connaîtra une longue carrière en Afrique ou en Amérique du Sud.
Peugeot 406 (1995-2004) : 1 667 364 ex
La 406, c’est un peu l’aboutissement de la 405, mais aussi de la 504 et de la 505: style réussi, qualité de fabrication, coupé somptueux, moteurs V6, tenue de route exemplaire, que du bon. Oui mais voilà, le développement à outrance des autres segments lui font du mal, et ses ventes s’en ressentent par rapport à ses devancières. Cette fois-ci, Peugeot dispose dans sa gamme d’un monospace, tandis que le segment inférieur (306) récupère une carrosserie break et un cabriolet. Autant de client en moins pour la 406 qui réalise tout de même un excellent score à faire pâlir la 508 d’aujourd’hui.
Peugeot 305 (1977-1988) : 1 649 177 ex
Bien que discrète et cohabitant avec une 505 qui la cannibalise dès 1979, la 305 n’a pas à rougir de sa production, séduisant une clientèle Peugeot traditionnelle en deux carrosseries, berline 3 volumes et break. Loin des extravagances de chez Renault. Elle cultive un air de ressemblance avec la 604 mais aussi avec Mercedes, tout en restant très sage. En 12 ans, elle fait presque aussi bien que la 406 pourtant autrement plus réussie, elle qui n’était qu’une 304 améliorée et étirée !
Peugeot 505 (1979-1997) : 1 351 254 ex
La 505 était l’aboutissement de la 504. Bâtie sur le même principe, robustesse et propulsion (elle sera la dernière Peugeot à roues arrière motrices), elle monte en gamme pour laisser un peu de place à la 305 et récupère du muscle (Turbo) et plus tard du velouté (V6). Elle capte aussi une clientèle familiale non négligeable avec sa version break à 7 places qui lui permet de lutter, en Europe, jusqu’en 1992 face à l’Espace de Renault, avec un certain brio ! Sa fin de carrière sera d’ailleurs focalisée là-dessus, laissant le luxe et la puissance à la 605, et la modernité à la 405. Une chose est sûre : malgré un positionnement bâtard, elle aura fait mieux que résister (bénéficiant aussi d’une production étrangère, notamment en Chine où elle restera au catalogue jusqu’en 1997.
Peugeot 403 (1955-1966) : 1 214 126 ex
La 403 inaugure la série, même si la 203 avait déjà le même positionnement. Modèle quasiment unique pour Peugeot (elle cohabite avec la 203 pendant 5 ans toutefois), elle bénéficie de toutes les attentions de la marque. Berline, cabriolet, break, familiale, utilitaire, elle fait tout, sans rentrer dans l’exubérance de Citroën. Elle inaugure en outre ce qui sera le point fort de Peugeot : le diesel !
Peugeot 407 (2004-2011) : 896 400 ex
C’est un peu le début de la fin. Stylistiquement, la 407 perd la grâce initiée par la 405 et la 406. Le segment D commence à décliner fortement et le style déséquilibré (en berline, break ou coupé) lui fait perdre du sex-appeal. Il ne s’agit pas d’une mauvaise voiture, mais il lui manque le “je ne sais quoi” de ses devancières alors que le contexte n’est pas en sa faveur.
Peugeot 203 (1948-1960) : 699 863 ex
Sa place en queue de peloton ne doit pas lui enlever son mérite : à cette époque, produire une voiture était compliqué par manque de moyens et ressources matérielles (l’acier est compté). En sa qualité de voiture “moyenne” (imposée à Peugeot par le Plan Pons), elle touche évidemment moins de clients potentiels que les segments inférieurs (Citroën 2CV, Renault 4CV) que Peugeot, trop légaliste, n’a pas voulu attaquer comme ses concurrents. Elle a cependant posé les base du succès des années 60 et 70 : une voiture fiable, robuste, versatile et relativement valorisante.
Peugeot 508 I (2011-2018) : 560 000 ex
Dans un contexte compliqué (déferlante de SUV), la 508 première du nom n’aura pas démérité. Elle fait largement mieux que la 607 et n’est pas si éloignée de la 407 sur un segment D de plus en plus boudé. Elle fait aussi jeu égal avec sa cousine Citroën C5 II qui bénéficie pourtant d’un accès au marché chinois plus conséquent. Sérieuse à défaut d’être enthousiasmante, elle récupèrera la clientèle traditionnelle de Peugeot au maximum avant qu’ils ne partent vers les SUV définitivement.
Peugeot 508 II (2018- ) : 128 325 ex (en cours)
La 508 II est une sorte de baroud d’honneur. Malgré les cartons des SUV Peugeot (3008 et 5008), la marque persiste à proposer une berline familiale traditionnelle en misant sur un style acéré. Malheureusement, il est trop tard pour rivaliser avec les allemandes de ce type qui ont capté la clientèle avide de luxe et de statut social, tandis que sa clientèle traditionnelle s’est définitivement tournée vers les SUV. Résultat, elle fait de la figuration malgré une intéressante 508 PSE. Si sa carrière n’est pas terminée, il lui semble difficile de grimper une marche de plus dans ce classement !