Proche du haut de gamme par sa proximité stylistique avec la Renault 30 et ses moteurs Turbo-Diesel partagés sur la fin, remplaçante d’une Renault 16 qui resta à ses côté au catalogue pendant presque 5 ans, pas beaucoup plus grande ni plus moderne qu’une Renault 18 née à peine 3 ans après elle, et concurrencée par ailleurs par une séduisante CX et des sérieuses Peugeot 504 et 505, la Renault 20 aurait pu être une catastrophe industrielle. Pourtant, la 20 sut capter sa propre clientèle et se faire une place au soleil, discrètement mais sûrement. Certes, ses ventes resteront en-deçà de la concurrence mais le duo qu’elle formait avec la 30 au sommet de la gamme Renault avait su convaincre la clientèle par son confort, son agrément de conduite et, osons le dire, sa modernité. La 25 qui leur succèdera en récupérera les fruits.
Production (1975-1984) : 607 405 exemplaires
Dont : 184 014 L/TL/GTL (1.6 L), 312 096 LS/TS (2.0 L), 34 689 TX (2.2 L) et 76 606 Diesel et Turbo Diesel
Une sage berline en complément de la Renault 30
Si la Renault 30 étrennait les spotlights du salon de Genève de mars 1975, sa presque jumelle Renault 20 n’allait pas tarder à pointer son nez. Sortie du même moule, dessiné par Gaston Juchet, la 20 déclinait vers le bas le style de la 30 mais s’en distinguait par une face avant plus classique (avec des feux sous glace, rectangulaires) et un accastillage moins pompeux. La vraie différence se situait sous le capot moteur : sur la 20, point de V6 mais uniquement des 4 cylindres, largement suffisant pour la majorité de la clientèle. D’autant que la voiture en elle-même offrait quasiment le même prestige. Dans l’idée des stratèges de Billancourt, la 30 devait enfin amener Renault vers le haut de gamme tandis que la 20 devait prendre la relève de la Renault 16 vieillissante. Toutes deux s’inspiraient de son architecture (deux volumes, hayons) mais privilégiaient un profil plus aérodynamique et plus statutaire.
Moderne mais trop modeste à ses débuts
La 30 devait donc lutter contre une Peugeot 604 sortie au même moment et dotée du même moteur (à quelques détails près). La 20, elle, bénéficiait à son lancement du vieillissement de la 504 mais devait affronter une redoutable Citroën CX parue tout juste un an auparavant. Etrangement, la 16 qu’elle devait remplacer restait au catalogue : une solution économiquement justifiable (profiter de l’amortissement du modèle pour marger) mais irrationnel d’un point de vue marketing. D’autant qu’à ses débuts, la Renault 20 s’équipent du même moteur, le Cléon Alu de 1 647 cc et 90 chevaux (96 à partir de 1977), jugé un peu juste pour la nouvelle venue. Elle était alors proposée en finition L, à l’équipement assez “léger”, TL plus huppée et GTL censée représenter le top de la gamme. Elles doivent alors se contenter d’une boîte manuelle à 4 vitesses (ou automatique à 3 vitesses). Les 4 roues sont indépendantes et le freinage à disques ventilés à l’avant, tambours à l’arrière.
Une proposition honnête
Présentée au Salon de Paris en octobre 1975, la 20 est commercialisée dans la foulée (novembre). A cette époque, ce type de berline rencontre un certain succès, et la présence du hayon est un vrai argument pour les familles grimpant dans la hiérarchie sociale et dans la gamme automobile de conserve ! D’ailleurs, l’habitabilité de la 20 fait l’unanimité même et l’équipement de la GTL sensation : direction assistée, fermeture centralisée, vitres électriques à l’avant, autant de gadgets synonyme de luxe à l’époque (aujourd’hui c’est la base). Malgré ce succès d’estime, tout le monde s’accorde pour trouver les performances assez quelconques. Renault va corriger la barre en juillet 1977 avec l’apparition de la TS, qui remplace justement la GTL mais avec un moteur enfin digne de ce nom et du gabarit de la voiture : un Douvrin de 1 995 cc et 110 chevaux (109 puis 104 chevaux au fur et à mesure des millésimes). La boîte reste à 4 vitesses (la BVM 5 rapports n’arrivera qu’en 1978 en option) mais la puissance est enfin là pour apprécier les qualités dynamiques de la voiture qui, à défaut d’être sportive, s’avère douce et confortable. En outre, cette version TS entreprend de se mettre un peu plus en valeur, notamment à partir de 1979 où le sigle “2 Litres” apparaît à l’arrière et les jantes passent à 14 pouces. En 1981, la Renault 20 LS récupérera aussi le même moteur, mais avec un équipement moins riche.
Un Diesel en complément
Comme beaucoup de constructeurs en cette fin des années 70 frappée par une crise du pétrole consécutive à la chute du Shah d’Iran, Renault avait anticipé en préparant une nouvelle offre pour sa R20 : en décembre 1979, celle-ci récupère un moteur Diesel atmosphérique sous les noms de TD et GTD (suivant les finitions TL et TS) : il s’agit lui-aussi d’un Douvrin dérivé du modèle essence 2 litres, de 2 068 cc et 63 chevaux. Les performances s’en ressentent, mais les consommations baissent, tout comme le coût à la pompe : un modèle idéal pour les commerciaux et autres VRP encore nombreux sur les routes.
Dacia 2000
Si l’on connaît bien les Dacia 1100 (dérivées de la Renault 8) ou 1300 (dérivées de la R12), on connaît moins bien la 2000 : normal car elle ne sera fabriquée qu’au compte goutte par le constructeur roumain, à la demande de Nicolas Ceausescu. Si les liens entre Dacia et Renault sont rompus depuis 1979, la demande de l’État Roumain est acceptée par la Régie pour la production d’une petite collection de Renault 20 en 1981. Il s’agit ici de CKD (des kits envoyés de France, prêts à monter sans infrastructures lourdes). Deux versions existent, en contradiction avec la dénomination de la voiture : 1.6 de 96 chevaux (environ 250 exemplaires) à destination de la Securitate, la police politique du régime, et 2.2 115 chevaux (5 ou 6 exemplaires) réservés à Ceausescu lui-même et à quelques dignitaires. La faible production en fait donc une rareté absolue.
Du nerf en essence, un turbo en Diesel
La Renault 20 entame les années 80 avec la force tranquille de celle qui fait bien le job. Elle est pourtant remaniée pour l’année-modèle 1981 : le train avant est légèrement modifié, tandis que le tableau de bord évolue. Rien de très folichon si ce n’est l’apparition d’une version particulièrement intéressante : la TX qui, comme son nom l’indique, vient coiffer la gamme en reprenant les lettres prestigieuses de sa sœur 30. Pas de V6 sous le capot, mais un 4 cylindres de 2 165 cc développant 115 chevaux : plus de puissance, plus de couple, ce bloc permet à la R20 TX de revenir dans la course face à la “petite” Renault 18 Turbo lancée en septembre 1980 et lâchant brutalement ses 110 chevaux. La 20 propose une autre philosophie, mais se replace entre la 18 et la 30 en termes de taille comme de performances. Enfin, en septembre 1982, la 20 reçoit enfin la motorisation Turbo Diesel de 85 chevaux déjà présente sous le capot de la 30. Pour l’année modèle 1983, les 20 reçoivent un petit becquet à la base de la vitre arrière, mais n’évoluent plus que par des détails : la fin est proche. La 25 est déjà dans les starting blocks, imprégnée de l’expérience du duo 20/30, et prête à prendre durablement le leadership sur le marché des grandes berlines françaises.
L’oubliée méritante
Avec 607 405 véhicules produits, la Renault 20 à la carrière plus courte que ses concurrentes (Peugeot 505, Citroën CX) s’en sort plutôt pas mal. Si l’on y ajoute les 136 403 Renault 30, le total n’est pas du tout ridicule et s’approche du score de la Renault 25 pourtant unanimement reconnue comme un succès. Cette dernière eut cependant l’intelligence de réunir en un seul modèle les qualités des deux précédents, du 4 cylindres au V6, de l’entrée de gamme au très haut de gamme, entraînant une dynamique favorable à l’ensemble des versions. La Renault 20, malgré ses qualités indéniables (en conduire une est toujours aussi bluffant tant cela paraît simple), est un peu oubliée de nos jours et c’est bien dommage.
Images : Renault Classic, DR
Un commentaire
La R20 avec son « air vain », une grande voiture familiale paraissant contenue aujourd’hui. C’était la vogue des aquarium en guise d’optiques à l’avant et sans quelques artifices cosmétiques, jantes flatteuses, joncs chromés, voire le beau dessin si ameublement de la sellerie cuir, c’était faire l’éloge de la banalité, un peu voiture en tergal. Mais, je me souviens de mon étonnement à voir la clé de serrure cylindrique et les petits témoins rouges de verrouillage dans leur capsule transparente. Cette auto était confortable et paraissait vaste à l’époque. Du moins est-ce le souvenir de l’immatriculée 508 QE XX couleur crème Montblanc praliné des parents d’un copain de classe. Presque 20 ans après, elle correspondait à la Simca Ariane, avec sa caisse de Vedette sans le V8 Aquilon, voiture des familles babyboomeuses, la R20 2,2 litres faisant écho à l’Ariane 8. On a retrouvé cela sur les premières Citroën C5 de l’an 2000. Du bon matériel de « transfuge de classe » pour qui venait de la R12 sans atteindre la 30, dispendieuse chez le pompiste et marquante socialement. C’est aussi le rôle de l’automobile que de transporter d’un état social à un autre. J’ai juste un faible pour la plus cheap, la R20 L, sans fioritures, 90 chevaux à l’alambic, mais avec une teinte flashy à souhait, seventies, orange andalou, bleu royal ou jaune tournesol.